AVERTISSEMENT

Je tiens à préciser pour les personnes qui auraient du mal à comprendre la démarche d’un blog (flatter l’égo démesuré de l’auteur, partager ses névroses, faire pleurer dans les chaumières, passer ses nerfs, raconter des conneries, informer un peu, se marrer beaucoup, toussa), que tout ce qui est écrit ici – non seulement n’engage que moi – mais surtout, que tout ce qui y est raconté est bien évidemment purement fictif. Par là j’entends que ces récits, satires, pamphlets, anecdotes (lorsqu’ils ne sont pas tirés d’ouvrages extérieurs) sont inspirés de faits réels mais sont, comme vous l’aurez tous compris, racontés à travers le filtre d’une imagination débordante et d’un esprit, je m’en excuse, légèrement névrosé.

vendredi 16 septembre 2011

Déclaration d'amour


Bon, vu que je me suis fais un peu mal, j'ai gagné une petite journée de repos, j'en profite donc pour vous faire partager mon amour du travail bien fait. J'ai eu la chance en arrivant dans ma nouvelle région et après quelques déboires tout de même, de tomber, vraiment par hasard, sur un excellent Maréchal Ferrant. 

Alors je ne saurais vous dire pourquoi, mais j'ai une immense admiration pour lui (et tous ceux qui font leur travail avec autant d'amour et d'implication que lui). Alors bon, oui, il est pas moche hein, il est assez bien foutu bien que pas vraiment mon type mais surtout, il est amoureux des pieds de mon cheval (comme moi ! hahaha ). 

C'est peut être idiot de le dire comme ça, mais c'est vraiment ce qui transpire de lui quand je le vois plié en 4 en train d'observer les aplombs de mon loulou, en train de se demander comment il peut faire pour lui apporter plus de confort, pour que son pied pousse mieux, qu'il s'abîme moins et moins vite, quelle taille de fer il va pouvoir lui mettre... Il est toujours à l'écoute de ce que je peux lui raconter, à la recherche d'un indice :

"- il se déplace très bien en ce moment" : alors là il est content, tout va bien

"- il trébuche un peu ces derniers temps" : là je vois son regard se focaliser sur quelque chose que je ne vois pas, très loin, alors qu'il continue à discuter comme si de rien n'était, je sais qu'il est en train de se dire qu'il va peut-être arrondir un peu plus la pince du fer pour aider le pied à basculer ou quelque chose comme ça. C'est inconscient, il ne s'en rend même pas compte, mais je le sais, ça se voit et ça se sent...

Alors évidemment, parfois il n'a pas trop le moral parce qu'il y a des gens qui ne comprennent pas, qui ne LE comprennent pas. Ce métier n'est pas qu'un gagne pain, c'est un sacerdoce, c'est un art et quand il se rend compte que la seule chose qu'on lui demande c'est de ferrer vite, pour le plus longtemps possible et le moins cher possible il ne comprend pas. Il ne comprend pas et moi non plus.

Un Maréchal Ferrant c'est un artisan, ce n'est pas une machine, essayez donc de faire ferrer votre cheval par une machine et ensuite faites le marcher pour voir... Vous voyez ce que je veux dire ? 

Petit indice :
Allez donc essayer de planter un clou en ne touchant aucune des parties colorées


Il faut voir marcher l'animal, le voir se déplacer, regarder ses aplombs, étudier ses membres en mouvement pour déterminer la meilleure manière de le "chausser". Alors ça ne se voit pas, mais lorsque mon Maréchal va chercher son "patient" dans son box et qu'il l'emmène au ferrage, l'air de rien, sur ces quelques mètres, il a tout vu, il a observé sans en avoir l'air : le bruit des fers sur le sol, leur usure , la pousse du sabot, les marques éventuelles, les petites atteintes à la couronne... Et s'il a un doute, l'air de rien il refait un petit tour ou un demi-tour pour jeter un oeil, on ne sait jamais. Il n'est pas rare qu'en passant il fasse observer que tel cheval a une petite atteinte à tel endroit, tiens ?... personne ne s'en était rendu compte.

Son oeil a tout vu et il a tout transmit à son cerveau, tout ça n'est pratiquement pas passé par la case Conscience tellement cela devient évident, et voilà qu'il se met au travail ; et on a qu'une envie, c'est de rester là à regarder, comme hypnotisé par un ballet incessant d'outils, de bruits, d'odeurs. Tout cela virevolte et s'enchaîne comme une partition jouée des centaines de fois, chaque geste est précis et d'une finesse extraordinaire comparée à la taille impressionnante des mains et des bras de l'artiste. Le dévidoir, la tricoise, la rénette, la mailloche, le fer qui rougeoie dans la forge et qui sera bientôt frappé contre l'enclume pour adapter parfaitement sa forme, la fumée et l'odeur qui se dégage au contact du fer chaud avec la corne, le crépitement des fers brûlants plongés dans l'eau, le bruit des clous qui s'enfoncent et, petit à petit, le pied qui se transforme. Il devient propre, net, confortable, adapté à l'activité du cheval, parfait.

Je suis toujours admirative de la subtilité qu'il met à nous servir le cliché du rugbyman  basque rustique et mal dégrossi alors qu'il est en train de sculpter amoureusement la forme parfaite pour le pied du cheval qu'il a entre les mains. 

Voilà, alors quand on l'appelle et qu'on lui demande de faire vite et le moins cher possible, il répond que "on" ne s'est pas adressé à la bonne personne, et il a raison...

Pour le plaisir :

Voilà l'artiste au travail













Et voilà le résultat à peine 20 minutes plus tard :


Bien dans ses pieds et décontracté




Merci à JJ pour les photos et surtout merci à toi N. bon courage et surtout félicitations pour tu sais quoi :)

4 commentaires:

  1. C'est vrai que c'est un beau métier. Mais les bons sont souvent débordés....

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  2. Oui, métier magnifique lorsque les gens sont passionnés. Il y a beaucoup de jeunes qui sont formés tous les ans, le tout et de trouver celui qui a été bien formé ;)

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  3. Il est beau ton cheval. Effectivement son avant-main est un peu particulière! Il doit donner une impression de puissance peu commune j'imagine. T'as beaucoup de chance, profite. Je le dis pour le dire, je sais que tu le sais après avoir lu quelques uns de tes posts! :)

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  4. clap clap des 2 mains pour cet hommage à l'homme de l'art!

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